Comment faire un retour constructif (1) ?
Partie 1 : les 3 questions centrales pour préparer ton feedback
Hello 👋
On a vu la semaine dernière pourquoi c’était utile de faire des retours à ton équipe sur son travail :
pour se situer, avoir un retour sur la qualité de son travail, ce qui donne du sens (vraiment, et pas artificiellement !)
parce que tu ne peux pas ne pas communiquer… et que donc si tu ne dis rien… ton équipe peut se faire un film assez facilement !
Donc, OK, mais maintenant comment faire pour tomber juste ?
👉 Comment faire un retour constructif ?
Pour moi ça se passe en 3 phases, pas seulement juste au moment où tu parles à ton équipe : il y a le avant, le pendant, et le après. Les 3 ont une importance sur l’efficacité de ce que tu vas pouvoir faire.
Ca peut avoir l’air long : ne t’inquiète pas, ce que je présente ne veut pas dire qu’il faut refaire tout le processus à chaque fois (si tu fais un brief équipe tous les jours, sans ça, tu n’as pas fini…). Les étapes 1 et 3 sont pour moi des étapes de fond qu’il faut avoir en tête, pour bien poser son processus, et revoir régulièrement pour réajuster, mais pas au quotidien !
Aujourd’hui nous allons voir la première partie, et non des moindres : la préparation. Je ferais bien le tout, mais ça dépasserait nettement les 2 minutes !
Partie 1️⃣ La préparation en amont
Avant de faire un retour, un feedback, il faut déjà savoir sur quoi le faire, et dans quel but : voilà l’objet de la préparation.
Qu’est-ce qui est utile comme retour à tes équipes ?
Il y a des chances que ton équipe s’en fiche pas mal que tu lui parles des résultats sur l’indicateur XYZ qui n’a en fait … qu’un faible rapport avec son travail quotidien.
Ce qui lui sert, c’est ce sur quoi elle a une prise directe.
Alors voici les questions à te poser pour tomber juste :
1️⃣ Qu’est-ce que tu attends exactement de tes équipes ? Tes objectifs centraux ?
On ne parle pas là des grands indicateurs, des KPI de l’entreprise : ils ne sont pas forcément parlants au niveau du terrain, parce qu’ils sont souvent le résultat du travail de… toute la boîte !
Même les indicateurs de ton secteur ne sont pas forcément ce qu’il y a de plus parlant. Un taux de remplissage ou un taux de réponse… c’est souvent le résultat de beaucoup trop de facteurs pour être encore assez factuel.
Non, là, il s’agit de prendre le temps de revenir à l’essentiel : quelles sont tes priorités à toi dans ce que doit faire ton équipe ? tes valeurs ? ce qui te tient à coeur, ce qui te fait dire : là, mon équipe a bien bossé.
Tu sais que s’ils ne peuvent pas tenir tous les objectifs demandés en même temps, il faut bien qu’il y ait une priorité quelque part. Il faut que toi et ton équipe soyez raccord sur ce que c’est, pour que ça marche, que ton équipe travaille dans le sens attendu, et que tes remarques, ensuite, ne tombent pas à côté de la plaque et les découragent.
Il y a ce qu’il est prévu de faire, qui devrait être faisable dans le cas normal où tout se présente correctement, et puis… il y a les aléas, les ratés rencontrés, les surcharges, qui font qu’à un moment, il faut choisir, car on ne pourra pas tout faire parfaitement.
Oui, ce n’est pas agréable à accepter (pour ton équipe non plus). Et c’est un problème facilement facteur de risques psycho-sociaux et/ou de troubles musculo-squelettiques, pour tes équipes … Je ne prévoyais même pas de parler de ça là, mais c’est le cas, et tu vois, tu peux, par tes choix, tes actions, avoir un rôle vraiment très important pour prévenir ces problèmes !
Les personnes de ton équipe feront les choix, les compromis qui leur paraissent logiques, avec ce qu’elle savent faire, leur vision, leurs valeurs. Ca peut être disparate, en plus, surtout si elles n’ont pas souvent de temps d’échange sur le travail pour se caler ensemble sur ce qu’il convient de faire, avoir des règles de métier communes.
Si ta vision des priorités n’est pas la même que la leur, tu ne vas pas comprendre leurs choix. Ils ne comprendront pas non plus tes retours (même tournés pour être constructifs), si vos attentes sont décalées.
Si tu veux que tout soit parfait, alors que ce n’est pas possible (avec les aléas rencontrés), tu les places dans une injonction contradictoire qui va les pousser… dans le mur. Ton équipe va chercher à faire toujours plus, plus vite, mais au détriment de sa santé, dans le stress, et si ça dure, elle va se lasser et juste renoncer à faire bien le travail car .. ce n’est pas possible, les attentes ne sont pas réalistes.
➡️ Pose-toi quelques minutes pour réfléchir à ce que tu veux vraiment maintenant, ce sur quoi tu veux qu’ils concentrent leurs efforts pour la période qui vient. Quand il y a des compromis à faire, comment tu le vois, toi, ce meilleur compromis ?
Par exemple :
tu gères un magasin, en ce moment, tu mets la priorité où ? sur la disponibilité de ton équipe pour les réponses aux clients, sur le remplissage parfait des rayons ? Les 2 concourent à la satisfaction client au final1, mais ne sont pas toujours gérables en même temps (ou alors, il faut que tu puisses augmenter les moyens de ton équipe, ou rendre le travail plus fluide pour que ça puisse être plus rapide)
tu gères le service hôtelier d’un EHPAD, mets-tu la priorité sur le fait que tous les résidents aient déjeuné avant 10h, ou qu’on respecte leur souhait d’heure de lever ? (Ils sont chez eux après tout, c’est leur lieu de vie, pas une prison. Quelle liberté on leur laisse si l’organisation est militaire ?)
tu gères des hébergements touristiques, c’est le jour d’entrée/sortie des clients, et voilà que certains clients arrivent en avance : qu’est-ce que tu considères être un bon travail ? Avoir fait absolument nickel … 3/4 des hébergements (car ça ne sera pas possible de livrer 100% nickel ET sans faire attendre les clients), ou les avoir tous rendus dans les temps, avec le meilleur compromis possible de ménage (c’est-à-dire les points essentiels d’hygiène, mais peut-être pas le détail des plinthes aujourd’hui ou 100% des toiles d’araignées, avoir refait toutes les vitres…)
Il faut te re-poser régulièrement cette question parce que ça peut évoluer. Certains grandes priorités restent stables, et sont des valeurs (par exemple, se dire que c’est un point essentiel pour le résident de ne pas être obligé de se lever, pour les contraintes du service). D’autres changent, selon les besoins du moment, l’évolution du service… A toi de voir : peut-être tous les mois, peut-être plus souvent au début, le temps de se caler correctement ensemble, peut-être moins souvent ensuite.
Le plus efficace est sans doute de te projeter dans le cas concret d’un scénario où tout n’est pas tenable en même temps, dans le jargon des ergonomes, on dit “simuler le travail”.
➡️ Imagine ton scénario catastrophe d’un jour où tout part en cacahuète pour ton équipe : qu’est-ce qu’il est absolument essentiel d’avoir fait à la fin de la journée ? Sur quoi on ne fait pas de compromis ? Voilà tes objectifs clairs.
Ce n’est pas marrant de se mettre dans le scénario catastrophe, mais c’est pire de laisser tes équipes se débrouiller avec, le jour où ça arrive, sans savoir où mettre la priorité !
Plus tu anticipes, plus tu peux peux prévoir en amont comment ces compromis se gèrent, plus tu les sécurises. Si c’est une dure journée, que tout le monde a du mal, mais qu’au moins ils savent dans quel sens travailler, ils ne perdront pas de temps et d’énergie à chercher où mettre la priorité, ni à stresser en se demandant si en plus d’avoir du mal à tout gérer, ils ne vont pas se prendre une avoinée de ta part parce que tout ne sera pas bien fait ! Ou des retours… à côté de la plaque, qui découragent parce qu’ils ne correspondent pas à l’effort réalisé.
2️⃣ De quoi ton équipe a-t’elle besoin, comme retours ?
Si tu n’en as pas trop idée, le plus simple est sans doute.. de lui demander ! Ca peut surprendre, au départ, et peut-être que tes collaborateurs auront du mal à te répondre, si tu le demandes comme ça, c’est un peu abstrait. Mais ça peut venir avec le temps, et surtout, tes collaborateurs sauront que tu es ouvert·e à leurs retours : ils pourront oser te dire que peut-être tel ou tel aspect était utile pour eux, orienter leurs efforts, ou au contraire, que ça ne leur a pas vraiment servi ou que c’était décourageant.
N’aie pas peur de leurs retours : plus tu seras ouvert·e, plus ils te diront les choses tôt, et en prenant des gants. Tu les respectes, tu les écoutes, ils t’écoutent. Au contraire, moins tu écoutes, moins ils osent dire, et alors quand ils disent… c’est que c’est suffisamment chaud bouillant pour exploser, et c’est pas avec des pincettes !
Pour commencer plus facilement, tu peux démarrer avec une question ouverte comme :
🔥 “C’est quoi pour toi faire un bon travail / une bonne journée ?”
🔥 “A quoi tu sais que tu as bien travaillé ?”
Cela leur fera parler de leurs propres critères de qualité du travail, ça t’aidera à voir à quoi ils accordent de l’importance et voir si vous êtes raccord. En plus, c’est une question très constructive et très riche pour construire un collectif, et construire la confiance avec eux ! (Franchement mieux que le team building, je te jure … un partage de fond comme ça, ça crée des liens bien plus que n’importe quoi d’autre).
Si tu ne te sens pas très à l’aise pour mettre en route un processus comme ça, n’hésite pas, je peux t’aider !
3️⃣ Par rapport à ce que tu attends comme résultats, au final, qu’est-ce qui dépend réellement du travail de ton équipe ? Sur quoi ils ont la main, vraiment ?
Tes retours ne doivent pas porter sur :
❌ des points qui ne dépendent pas de ton équipe, car c’est très frustrant et.. inutile !
Par exemple, tu gères un service client; fais attention que tes retours à ton équipe, ne portent réellement que sur ce qu’ils font : la réception des appels, la façon dont ils vont répondre au client, éventuellement la coordination de l’intervention si cela rentre dans leurs attributions, mais pas la satisfaction globale du client, qui dépend aussi de l’efficacité du service SAV… ou en tout cas, tu peux en parler comme paramètre général, mais en faisant bien la part de leur rôle dans ce résultat.
Je vois trop souvent revenir de questionnaires satisfaction après une intervention SAV, dont on ne sait pas trop, comme client, si on attend que je réponde sur le technicien qui s’est déplacé, ou sur l’ensemble de la chaîne. Les questions manquent souvent de précision et font un gros global dont je me demande bien ce que l’entreprise peut faire ! Parfois on comprend de qui on parle, arrivé à la fin du questionnaire… Ca ne va pas aider l’entreprise à améliorer grand chose, si elle ne sait pas où ça coince dans la chaîne quand les réponses ne sont pas très bonnes. Et il s’agit pourtant de grandes chaînes…
❌ des points qui dépendent bien de ton équipe, mais dont les conditions font que le résultat est impossible à atteindre et… tes collaborateurs pensent que tu dois le savoir. En tout cas, de leur point de vue, tu devrais ! Ne pas le savoir, c’est ne pas connaître assez leur travail, les difficultés rencontrées, et ça, ça met de la distance avec eux, ils ne vont pas se sentir reconnus, ni soutenus. Si es trop décalé·e dans tes retours, ils ne peuvent pas te faire confiance suffisamment pour te faire part des réels problèmes rencontrés, s’appuyer sur toi.
➡️ Centre-toi sur ce qui dépend d’eux
➡️ Reste réaliste dans tes attentes !
➡️ Quand tu demandes du travail, garde toujours bien en tête les conditions de faisabilité : ce n’est pas automatique, parce que tu demandes, que ton équipe peut faire.
➡️ Si tu ne le sais pas exactement … vas observer leur travail (pas avec un oeil de recherche de problème ou d’erreur ! … avec un oeil ouvert sur la réalité du quotidien, les aléas, là où ça coince, ce qui est compliqué…) et identifie quelles sont leurs conditions réelles de réalisation du travail que tu demandes. Tu as des chances d’être surpris·e !
Je te préviens, quand tu commences à mettre le pied là-dedans, tu ne l’en sors plus. Mais … c’est passionnant et ça te fera tellement avancer ! Tu cherches comment atteindre tes objectifs ? Va voir le travail, suffisamment, tu comprendras ce qui coince !
💥 J’ai un peu peur que tu sois en panique avec tout ce que je viens de te demander de faire !
Mais l’idée, pour moi, c’est aussi de tenir compte de tes conditions réelles à toi ! Et surtout pas de te décourager.
Donc, pour l’instant :
📌 si tes retours sont plutôt basés sur les grands indicateurs de ton entreprise, pas si précis que ça, trop théoriques…
📌 si parfois tes attentes ne sont pas tout à fait ajustées, réalistes…
Ce n’est pas si grave, Rome ne s’est pas construite en 1 jour, ton équipe peut le comprendre, ne révolutionne pas tout maintenant. Pars de ce que tu as. Laisse juste la porte ouverte aux remarques et besoins… ils t’aideront à construire des choses plus factuelles !
Déjà rien que de changer d’attitude, et de te sentir vraiment prêt·e à accueillir les retours de ton équipe, va changer la dynamique de ton brief. Pour le reste, prends le temps de construire ça, petit à petit.
Tu peux aussi simplement prévenir ton équipe que tu as envie de t’améliorer sur les retours que tu lui fais, que tu y travailles ! Rien que ça, ça peut vraiment changer la vision qu’ils peuvent avoir de toi.
Et si besoin, pour t’aider à trouver ton positionnement, les critères adaptés, je suis là !
Je pense que j’ai encore beaucoup dépassé les 2 minutes. Merci de m’avoir lue jusque là !
Donc pour résumer :
Ton job pour faire des retours efficaces, c’est de comprendre vraiment le travail de tes équipes, pour savoir définir les priorités essentielles, la vision à leur communiquer, et être à l’écoute de leurs attentes.
➡️ Tu pars de ces objectifs que tu as en tête clairement maintenant, et tu compares les résultats du travail, à ce qui te paraît faisable selon ces objectifs et les conditions de réalisation.
Dit comme ça, c’est plus court, mais sans tout ce que j’ai expliqué avant, ce serait juste une jolie phrase, sans vrai contenu… facile à dire !
Au fait, on n’a pas encore parlé de retours positifs ou négatifs : c’est normal. Ca ne change pas grand chose à ce stade ! Il faut déjà que tu saches clairement ce que tu attends, avant de dire quelque chose.
🚀 Passe à l’action !
1️⃣ Fais l’exercice maintenant : va voir ton équipe et demande à tes collaborateurs sur quoi ils aimeraient avoir des retours de ta part !
De quoi ont-ils besoin pour savoir s’ils vont dans la bonne direction ?
2️⃣ Partage cette news si tu penses qu’elle serait utile à d’autres !
Il y a des choses qui te chiffonnent, ou qui t’intriguent ? Dis-le moi en commentaire !
Bon, la semaine prochaine, on voit l’étape 2 ! Comment formuler les retours. Je me doute que c’est surtout ce qui te préoccupe, mais ça n’aurait pas eu de sens d’aborder comment les formuler, sans savoir déjà sur quoi te baser pour les faire ! Non ?
Bonne semaine ! ☀️
𝘑𝘦 𝘴𝘶𝘪𝘴 𝘔𝘢𝘵𝘩𝘪𝘭𝘥𝘦 𝘋𝘦𝘩𝘢𝘮𝘦 🧞♀️𝘦𝘵 𝘫𝘦 𝘵'𝘢𝘪𝘥𝘦 𝘢̀ 𝘮𝘪𝘦𝘶𝘹 𝘨𝘦́𝘳𝘦𝘳 𝘭'𝘩𝘶𝘮𝘢𝘪𝘯 𝘦𝘯 𝘦𝘯𝘵𝘳𝘦𝘱𝘳𝘪𝘴𝘦, 𝘳𝘦𝘵𝘳𝘰𝘶𝘷𝘦𝘳 𝘭𝘦 𝘱𝘭𝘢𝘪𝘴𝘪𝘳 𝘦𝘵 𝘭𝘢 𝘱𝘦𝘳𝘧𝘰𝘳𝘮𝘢𝘯𝘤𝘦 𝘥𝘦 𝘵𝘳𝘢𝘷𝘢𝘪𝘭𝘭𝘦𝘳 𝘦𝘯 𝘤𝘰𝘯𝘧𝘪𝘢𝘯𝘤𝘦 𝘢𝘷𝘦𝘤 𝘵𝘦𝘴 𝘦́𝘲𝘶𝘪𝘱𝘦𝘴 !
𝘉𝘦𝘴𝘰𝘪𝘯 𝘥'𝘦𝘯 𝘥𝘪𝘴𝘤𝘶𝘵𝘦𝘳 ?
Quoique.. très honnêtement, moi comme cliente, que les paquets de pâtes soient bien alignés ou non, ne me fait ni chaud ni froid ! L’essentiel est plutôt que je n’aie pas tourné en rond 3 fois dans le magasin pour trouver ce que je veux, que le prix soit le même que quand je passerai à la caisse et que je n’aie pas besoin de me poser la question de risquer de tomber sur un produit périmé ! Comme quoi, entre les critères du client selon le dirigeant, le manager, l’équipe, et le client lui-même, il y a des différences à chaque étape !